1 – Des Origines de la Réforme à la Révocation
.Dès 1562, le culte catholique n'était plus célébré à Saint-Michel. Il n'y avait du reste, en 1583, que deux ou trois catholiques. L’Église acheta en 1618 une maison pour en faire un temple. Ce premier temple aurait été démoli en 1630.
St-Michel fut presque toujours unie à Chalancon.
Toutefois, en 1664, le pasteur Timothée Dauphin y résidait.
Au Synode de 1678, le sieur Tribuols, député de l’Église de St-Michel, demande qu'il plaise à l'assemblée de lui donner quelque consolation pour l'exercice du saint ministère dans le temple qu'ils ont réparé. Et, de plus, que, pour l'entretien du ministre qui leur sera donné, la parcelle basse de Silhac soit jointe à Saint-Michel.
Le Synode loue « le zèle » de cette Église, mais, comme il ne peut lui accorder présentement un Ministre, il diminue de 30 livres la contribution qu'elle doit à l'Église de Chalancon, afin que cette somme soit employée à l'entretien d'un lecteur qui fera la prière publique dans le temple de St-Michel. St-Michel comprenait alors 97 familles huguenotes et 13 catholiques.
Au Synode de 1670, le pasteur Meissonnier, de Saint-Sauveur, avait demandé que la parcelle basse de Saint-Michel soit jointe à Saint-Sauveur, à cause de la proximité des lieux et de la commodité des habitants ainsi que de la faiblesse de l'Église de Saint-Sauveur. Le Synode nomme des commissaires qui se transporteront sur les lieux. Sur leur rapport, le Synode suivant décide qu'il n'y a pas lieu de faire aucune séparation.
René Ladreyt de la Charriére, pasteur de Gluiras, prêcha le dimanche 18 juillet 1683 à St-Michel où se trouvèrent tous les habitants de Gluiras quoiqu'éloignés de plus d'une lieue. De même, le 1er août, Théophile Blanc, pasteur de Chalancon.
Le temple de St-Michel fut démoli, comme beaucoup d'autres, en septembre suivant, par les dragons. En 1684, le pasteur Meissonnier, chargé officiellement de baptiser les enfants protestants de la région, s'établit à St-Michel.
2. - De la Révocation à la Révolution
L'état des fugitifs porte, pour Saint-Michel, Pierre Duchamp (ou Champ) et Claude, son fils ; Louis Peyret, dit Tribuols, et Marie sa soeur. Plus tard, nous trouvons établis à Genève : Marie Barlie (admise par le Consistoire en 1717), Jean-Pierre Brunet et Louis Ponton, cordonnier,
Lorsque se tinrent les grandes assemblées, dites prophétiques, de 1689, l'une d'elles, de 4 ou 500 personnes, eut lieu le jeudi 16 février dans la paroisse de St-Michel, au cours de laquelle Claudine Duval, femme de Jean-Pierre Espinas, se vanta d'avoir reçu le Saint-Esprit et le don de prophétie.
A Ranchon, vivait alors une famille très attachée à la foi huguenote : les Marlier.
Les prédicants et prédicantes de passage étaient toujours bien reçus chez eux. Isabeau Dauphinenche, marchande ambulante et zélée prophétesse, s'y arrêta plus d'une fois et y faisait la prière.
Une assemblée étant convoquée au Creux de Veye, près des Ollières, le mercredi 14 avril 1701, toute la famille s'y rendit. Une jeune fille, Marie la Boiteuse, y aurait pleuré du sang. Mais les soldats, alertés, surprennent l’assemblée et arrêtent une cinquantaine de personnes, dont David Marlier, sa femme et ses trois fils. Tous les cinq ont, à l'interrogatoire, une ferme attitude. La femme Marlier, Marguerite Vignal, déclare se repentir d'avoir fait abjuration si elle l'a fait contre son salut. Jacques Marlier, lui, veut professer la R. P. R. durant sa vie et sa mort. Quant à David Marlier, il affirme être né huguenot et vouloir vivre et mourir tel. Faisant profession de la R. P. R., il prête serment la main levée à la manière réformée. Il dit se repentir d'avoir fait abjurationet croit que Dieu avait fait la grâce à cette fille (Marie la Boiteuse) de pleurer des larmes de sang pour convertir les hommes, leur faire avoir des regrets de tant de péchés qu'ils commettent, et leur inspirer le repentir d'avoir quitté la bonne religion. Enfin, il a toujours désiré que ses enfants soient de la religion dans laquelle ils ont été baptisés, qui est la R. P. R., parce qu'il ne trouve pas son salut dans la religion catholique. Les fils Marlier sont envoyés aux galères où ils resteront seize ans. Un autre fils, Etienne, arrêté par la suite semble-t-il, mourut à Beauregard. Quant à David Marlier, il fut parmi les cinq condamnés à mort dont l'exécution devait avoir lieu en cinq endroits du Vivarais afin d'intimider les religionnaires. Marlier fut donc pendu à Vallon. Il alla courageusement au supplice. Sa maison fut rasée. Ainsi, dans un même jour, écrit Antoine Court, sa femme- qui paraît avoir été libérée après plusieurs mois de détention - se trouva sans mari, sans enfants, sans maison et sans biens.
Isabeau Faure, veuve Reynier, d'Issantouams, fut arrêtée à la même assemblée. Elle déclara à Dumolard être de la religion de Dieu et refusa de prêter serment.
La petite troupe camisarde levée en 1704 par Dortial séjourna sans incident à St-Michel.
Plus tard, les pasteurs du Désert tinrent maintes assemblées dans la paroisse. Des informations contre elles furent faites en 1745. Par exemple, contre celle, réunissant environ 2.000 personnes, tenue le 7 mars par le ministre Coste proche le lieu de Palis. L'on y trouve le terrain extrêmement foulé, plusieurs pierres rangées pour former des sièges. Le dimanche 5 décembre de la même année, Désubas présida une assemblée près de Saint-Michel, au cours de laquelle il fit deux baptêmes. Tout le monde, écrivait son collègue Coste, convint que ce jour là il s'était surpassé et bien des gens crurent qu'il semblait présager ce qui allait lui arriver dans la semaine. En effet, le samedi, Désubas fut arrêté près de Saint-Agrève et conduit à Vernoux, où les troupes tirèrent sur la foule accourue pour le délivrer.
L'on allait cependant vers des temps meilleurs. Un jour vint où l'on put se réunir à lieu fixe, à Rias pour St-Michel, et où les pasteurs purent s'établir dans un quartier déterminé. Celui de Saint-Jean-Chambre, auquel appartenait Saint-Michel, eut d'abord pour pasteur le fameux Peirot, puis Jacques Brunel.
A la fin du XVIIème siècle, l'on comptait 460 nouveaux convertis à Saint-Michel et 30 catholiques. Vers 1740, La Devèze évaluait à 100 les familles de N. C. de la paroisse (22 catholiques).
3. - De la Révolution à nos jours
A la Révolution, le pasteur Jacques Charra vint se fixer à St-Michel. Il y remplit les fonctions de secrétaire et d'officier de la garde nationale. Sans doute est-ce lui qui rédige la déclaration faite par les citoyens de St-Maurice et de St-Michel, réunis le 14 juillet 1790 pour célébrer la fête mémorable de la Bastille. Réjouissons-nous, chers concitoyens, y est-il dit, nous ne sommes plus sous la servitude affreuse où nous et nos pères infortunés avions trop longtemps gémi, nous sommes libres Israélites exempts de captivité de l'Égypte tyrannique et ramenés du désert de Canaan dans la Terre Promise, rendons grâces au ciel des bienfaits qu'il a versés sur nous. En 1795, Charra déclare devant le greffier commis par le maire, conformément à la loi, qu'il se propose d'exercer le ministère d'un culte connu sous la dénomination de culte protestant, dans l'étendue de cette commune. Précédemment, la municipalité avait décidé que le culte catholique serait pratiqué le matin et serait terminé à 10 heures précises. L'église était mise ensuite à la disposition des citoyens protestants pour l'exercice de leur culte. Effectivement Charra présida plusieurs assemblées religieuses dans l'église.
Lors de l'application du régime concordataire, Saint-Michel fut rattaché à l'Église consistoriale de La Voulte, section des Ollières. A l'une de ses premières séances, le Consistoire est saisi d'une pétition des principaux habitants de St-Michel qui réclament chez eux la célébration du service divin. Il décide que le pasteur Crumière, chargé de la section des Ollières, se rendra à St-Michel de temps à autre pour y présider des assemblées.
Jusqu'à la construction du temple, l'on se réunissait toutes les trois semaines vers 1835, dans un bois voisin du village.
Lorsque, en 1807, le Préfet désigna Les Ollières comme lieu devant recevoir le temple de la section, le Conseil municipal de Saint-Michel protesta avec véhémence. Les protestants de cette commune, dit la délibération, sont venus à la mairie pour manifester leur surprise, leur inquiétude et leur mécontentement de ce que Saint-Michel ne se trouve point compris dans l'arrêté. Pourtant Saint-Michel avait, avant la Révocation, un temple dont on peut voir des vestiges de ses ruines. De plus, Saint-Michel est un endroit très central, plus commerçant que Les Ollières, traversé par plusieurs routes.
La décision préfectorale n'eut d’ailleurs pas de suites. Et il fallut attendre plus de trente ans avant de pouvoir reprendre sérieusement le projet de construction d'un temple à St-Michel.
En 1833, un particulier, Tremolet Chypre, offrait, moyennant une indemnité préalable, de fournir pour la célébration du culte une maison solide, vaste et commode, mais inachevée. Bien que le Conseil municipal ait décidé, deux ans plus tard, que le culte protestantserait célébré dans le local en question, les choses en demeurèrent là. D'ailleurs le préfet jugeait la maison Chypre trop proche de l'église.
Enfin, en 1840, le Consistoire approuve le projet qui lui est soumis de construire un temple neuf sur le terrain que Jean Antoine Gaudemard cède gratuitement à cet effet. La dépense est évaluée à 8.000 fr. Les souscriptions s'élèvent à 4.050 fr., la commune promet 900 fr. Il manque 3.050 fr. qu'on demande au Gouvernement.
Le pasteur Delétra, en tournée l'année suivante dans l'Ardèche, nous donne des précisions sur la manière dont furent recueillies les souscriptions par le pasteur Galier, des Ollières : Il lui a fallu courir de maison en maison, dans six communes, pendant un mois et demi, accompagné de quelques anciens ou diacres. Il rencontrait quelquefois du mauvais vouloir, de l'indifférence et de l'avarice. Il se fâchait alors, mais au bout du compte, il a réussi et il s'est fait beaucoup aimer par son zèle. C'est intéressant et pénible à la fois d'entendre raconter toutes les luttes que les pasteurs ont à soutenir contre le Gouvernement, les municipalités, les catholiques, les maires et les troupeaux apathiques. Tout ce qui est nouveau épouvante. Il y a peu de dévouement. Les riches sont presque tous enfoncés dans la matière et le commun des habitants est pauvre. Il convient de noter que parmi les souscripteurs se trouvaient plusieurs catholiques.
Delétra présida une assemblée de près de 500 personnes à Saint-Michel. L'on avait apporté la chaire d'Aliandre. Le lieu de cette assemblée, dit-il, est des plus beaux. C'est dans une éclaircie d'un bois de châtaigniers sur une pente de montagne. Les auditeurs ont devant eux un magnifique panorama de montagnes plus basses dont les croupes arrondies se succèdent à perte de vue... Aux prières tous les auditeurs tournent le dos au prédicateur et s'agenouillent sur les pierres qui leur servent de sièges. Il semble dommage qu'on bâtisse des temples actuellement. Mais l'hiver et les pluies font trop souvent manquer les assemblées.
L'on se mit à la construction du temple en 1843. Le devis s'élevait à 9.183 fr, mais des travaux supplémentaires durent être faits et le coût total de l'édifice se monta à 11.536 fr.
En août 1844, l'ouvrage étant terminé, le Conseil municipal invite le Consistoire à prendre les mesures nécessaires pour la dédicace du temple. Celle-ci a lieu le 13 octobre 1844 en présence d'un grand nombre de fidèles, d'anciens et de diacres et avec le concours de douze pasteurs. M. Johanens, maire de Saint-Fortunat, délégué du Préfet, dans une courte allocution, fait valoir les avantages qui résultent, pour l'ordre social, de l'édification de nos temples. Après avoir fait à Dieu la consécration de l'édifice, le pasteur Meyer, président du Consistoire de La Voulte, prononce un discours d'une éloquence grave, onctueuse, digne du sujet et du lieu, qui a profondément ému tous les auditeurs.. Il avait pris pour texte : Que ce lieu est respectable ! C'est ici la maison de Dieu, la porte des cieux (Genèse 28, 17). Ce que sont les temples, les dispositions dont on doit être revêtu en y entrant, la comparaison des temps de douloureuse mémoire qu'eurent à traverser nos pères et le bonheur du temps où nous vivons, le devoir des fidèles de répondre à tant de bienfaits de notre Dieu, l'harmonie, les bons rapports qui doivent exister entre les catholiques et les protestants... voilà les idées principales de ce discours. Le pasteur de Saint-Fortunat, A. de Magnin, prononce ensuite sur ces paroles : Levez-vous, bénissez l'Éternel, (Néhémie 11, 5) un discours qui a fortement incité l'attention. Son organe fortement sonore et vibrant a puissamment remué le nombreux auditoire... Un mélange de joie, d'attendrissement et de bonheur, conclut le compte rendu, se faisait remarquer sur toutes les figures.
Heureux de posséder un temple, les fidèles voulurent avoir un pasteur à demeure.
Déjà en 1837, le Consistoire avait demandé au ministre la création d'une place de pasteur à St-Michel. Il revient à la charge en 1845. Le Conseil municipal, consulté, appuie fortement la demande. Il expose que le service est trop pénible pour le pasteur des Ollières qui ne peut pas toujours y suffire malgré son zèle et son activité. Il estime regrettable que la moralité religieuse n'ait pas un interprète à St-Michel. L'on aurait voulu adjoindre à la nouvelle paroisse les extrémités de St-Maurice et de Silhac, mais le Consistoire de Vernoux, dont dépendaient ces communes, s'y opposa.
La place fut créée en 1849. Le premier pasteur, Charles Vermeil, fut solennellement installé dans le temple par le pasteur Demagnin, le 5 janvier 1851. La commune aidée par les avances de quelques protestants et un secours de l'État fit, peu après, élever près du temple un presbytère commode et agréable. Naturellement StMichel fit partie en 1852 du Consistoire des Olliéres, nouvellement constitué.
Actif et zélé, le pasteur Vermeil quitte la paroisse après six ans de ministère, regretté des fidèles et du Consistoire, qui rend hommage à ses qualités pastorales. Son successeur, Antoine Sabatier, homme de foi, de piété, de charité, exerce dans l'Église un fidèle ministère de vingt ans. Lorsqu'il prend sa retraite pour cause de maladie en 1876, le Consistoire nomme Jean Maillet qui, lui aussi, exerce pendant vingt ans, jusqu'à sa mort, avec zèle et dévouement les fonctions pastorales à St-Michel. Après deux courts ministères, interrompus le premier par une opposition systématique, le second par des circonstances de famille, un ancien prêtre, homme éloquent, Jean-Eugène Nézereau, entre en fonctions.
A maintes reprises, des réparations et des aménagements sont faits au temple. Par exemple, en 1864, en 1885 et en 1890. En 1879, il était question de doter le temple d'un clocher et d'une cloche, ce à quoi s'opposait le Conseil municipal. En 1890, l'on décide d'aménager une salle annexe, reconnue comme très nécessaire. A la même époque, la voûte est refaite. Le dimanche 23 août 1893 a lieu la dédicace du temple restauré. Le pasteur Crès, de Vallon, prêche sur Ps. 102, V. 15 et rappelle à ses nombreux auditeurs jusqu'à quel point cette maison et les cérémonies qui s'y accomplissent doivent leur être chères.
L'Église de St-Michel adhéra, dès le début, à l'organisation synodale officieuse et entra tout naturellement, à la Séparation, dans l'Union des Églises Réformées Évangéliques. Elle reçut, en 1913, le Synode de la Basse-Ardèche.
Cet historique a été préparé à partir du livre : Le Vivarais et le Velay protestants, Notices paroissiales, Samuel MOURS, Imprimeries réunies, 9 rue Pasteur, 26 000 Valence-sur Rhône, 2ème trimestre 1947.
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Texte : Théodore Pascal, tous droits réservés.