79400 Saivres.
Historique : Renseignements complémentaires et photos souhaités. Merci d'avance.
Personnes inhumées :
Quand à Saivres, on jugeait les morts
Après la révocation de l'Édit de Nantes, les protestants eurent beaucoup à souffrir pour leur religion. Même les morts n’étaient pas épargnés. On peut citer le cas de la nommée Jeanne Branger du village de Paunay. Elle abjura le calvinisme sous la contrainte comme tant d’autres, mais ne se rendit jamais à l’église. En l’an 1700, à l’article de la mort, elle reçut la visite de François Boucher curé de Saivre, qu’accompagnait le sacristain François Maupin. Jeanne Branger refusa le secours de la religion qui, déclara-t-elle, n’était pas la sienne. Elle trépassa quelques heures plus tard et fut inhumée dans son jardin.
Une instruction ayant été ouverte sur dénonciation, du dénommé Pierre Foucault de St Maixent, le lieutenant général de St Maixent , François Brunet sieur de l’Houmeau, ouvrit une instruction. Après audition de quelques témoins, le 1er avril 1700, la chambre criminelle de la sénéchaussée ordonna dans son jugement:
" ...Avons déclaré et déclarons ladite Jollet atteinte et convaincue de crime de relaps et ordonnons l’exhumation du cadavre d’icelle par l’exécuteur des sentences criminelles de ce siège et que son cadavre soit traîné sur une claie, de la principale porte de la maison où elle est décédée jusqu’au bout de la rue principale du bourg de Saivre et privé de sépulture. Il sera adjugé en outre, au profit du Roi, sur les biens de la condamnée la somme de trente livres d’amende ". Et la sentence fut exécutée.
Cimetière protestant
L'origine des cimetières de famille, remonte au début du protestantisme, bien avant la promulgation de l’Édit de Nantes en 1598. La religion réformée étant illégale, les morts n’avaient pas droit aux sépultures dans le cimetière paroissial. Le cimetière, qui comme à Saivres, entourait l’église, était exclusivement réservé aux catholiques.
Les premières persécutions, consistaient à déterrer les cadavres des individus reconnus appartenant à la religion réformée, de la terre consacrée du cimetière et à les jeter aux ordures.
En cas de décès d’un protestant, il fallait dissimuler sa mort pour que le prêtre ne lui donne pas les sacrements de l’Église et l’inhumation se faisait de nuit dans un terrain proche de l’habitation. Pas question de tombeau ni de clôture en pierres sèches. L’emplacement était matérialisé quelquefois, par des pierres enterrées ou la plantation d’un arbre. Au XVIIIme siècle, les choses n’ont guère évolué. Au décès d’un membre de la religion réformée, un parent ou un voisin allait demander au curé de la paroisse la sépulture au cimetière paroissial. Le curé refusait automatiquement et le déclarant devait adresser une requête au juge qui autorisait par ordonnance l’ensevelissement en terre profane. Voici un exemple :
1773 Monsieur le lieutenant Général de la Police à Saint Maixent
22 déc
Supplie humblement Louis Redien laboureur demeurant au Grand Magnou paroisse de Saivre disant que Michel Delaumosne son oncle maternel agé de environ soixante ans, est décédé la nuit dernière environ l’heure de minuit après une longue maladie, audit lieu du Magnou. Comme il ne fréquentait ny l’Église de sa paroisse ny les sacrements de l’Église et quil n’en a reçu aucun ny mesme vu son curé ny aucun prestre pendant sa maladie le sieur curé de Saivre luy refuse la sépulture ecclésiastique a ces causes le suppa. requiert que de considéré Monsieur s’il vous plaise luy permettre de faire inhumer le corps dudit Michel Delaumosne décédé veuf de Marie Jollet ou bon luy semblera et ferez Justice. signé: Louis Redien
Soit montré au procureur du Roy a St Maixent le 22 xbre 1773
signé : ....De Guibertière
Vû la présente requeste ensemble. L’ordonance à nous de soit montré en date de ce jour, comme aussi les causes du refus du sieur curé de Saivre d’inhumer le corps dudit Michel de L’aumosne énoncés en laditte requeste.
Je n’empêche pour le roy l’inhumation requise du corps dudit Michel De l’aumosne pourvu toutefois qu’elle se fasse nuitamment et sans aucun scandale, et seront ces présentes ensemble. L’ordonnance à intervenir déposées au greffe du siège royal de police de cette ville pour y avoir recours en cas de besoin, à Saint Maixent ce 22 décembre mil sept cent soixante treize
signé : illisible
Soit fait aussi qu’il est requis par le procureur du roy à St Maixent ce vinqt deux décembre mil sept cent soixante treize.
Demande de permis d'inhumer et réponse
En ce qui concerne les pasteurs, le lieu de leur inhumation était matérialisé par un sapin ou un cyprès. Ces arbres, dont on peut voir encore aujourd’hui, bien que plusieurs fois centenaires, étaient appelés des parpaillots. En réalité, ce mot était un sobriquet donné aux fidèles de la Religion Réformée.
Permis d'inhumer des habitants de Saivres délivrés à St Maixent de 1740 à 1788
11- 02 - 1741 : ALIX Marie épouse Micheau François, marchand à la Chaillochère.
26- 04 - 1741 : DUBOIS Jean époux Rageau Marie, du Pont de Saivres.
11- 03 - 1743 : CADIOT Jeanne, 78 ans, épouse Baron François, fermier au logis de Saugé, et belle mère de Rougier Louis, laboureur.
2 - 1- 1744 : VIGNAUD Jacques, 10 ans, fils de François, laboureur au Pinier de la Chaillochère.
3 - 3 - 1744 : CHARRON Jacques, laboureur au Perré, père de Jean.
5 - 3 - 1744 : BRICOU Suzanne, 50 ans, épouse Gervais Jean, tailleur d'habits à Verrière.
5 - 3 - 1745 : BRARD Louis, 78 ans, laboureur à Lugné, beau père de François Fichet.
4 - 6 - 1745 : BRANGER Marie, 55 ans, célibataire, tante de Pierre Martin laboureur à Paunay.
9 - 12-1745 : HERCOURT Suzanne, 35 ans, épouse Deré Louis, du Pinier.
6 - 4 - 1746 : LONGEAU Jean, 70 ans, de Lugné, père de Pierre.
7 - 5 - 1746 : RAYMON Marie, 84 ans, veuve Barré Jean, mère de Pierre, journalier à Perré.
6 -9 - 1746 : FAVRIOU Pierre, 75 ans, laboureur à Paunay, oncle de Jacques Favriou.
?- 3 - 1747 : SAPIN Jeanne, 69 ans, du logis du Plat d'Étain à Saivres.
5 - 10-1747 : PROUST Abraham, laboureur à la Blanchardière, beau père de Fichet Daniel.
13- 9 - 1748 : MOCHON Madeleine, 22 ans, épouse Jean Proust, laboureur à la Blanchardière.
18-10- 1748 : BEBIEN Pierre, 50 ans domestique, père de Jean journalier à Verrière.
7 - 7 - 1749 : CARRY Daniel, 26 ans, fils de Paul, maître de poste aux chevaux à l'auberge de la Coupe d'Or, paroisse de Saivres.
Novembre 1751 : BARRE Élizabeth, 56 ans, épouse Paul Carry maître de poste à l'auberge de la Coupe d'Or.
Mai 1752 : CARRY Paul, 48 ans, père de Marie, auberge de la Coupe d'Or.
Juillet 1752 : BRANGER Jacquette,77 ans, mère de Jean Charron, laboureur au Pairé.
Mars 1754 : MORILLON Jean, 38 ans, charpentier à Vix.
Mai 1755 : BREUILLAUD Marie, 36 ans, épouse Desré François, meunier au moulin de Piot.
Mai 1755 : DELAUMOSNE Louis, 57 ans, du Grand Magnou.
Sept 1755 : DUBOIS Jacquette, 45 ans, épouse Pierre Chartier laboureur au Pinier.
Juin 1756 : ALIX Philémon, 56 ans, père de Philémon, du logis de Saugé.
Novem. 1759 : CHARRIER Madelaine, 60 ans, veuve Proust Abraham de la Blanchardière.
Mai 1760 : JOURDAIN Jacques, de Verrières, frère de Charles, journalier.
Novem. 1760 : GILBERT Marie, 76 ans, épouse de Jacques Pétrault tailleur d'habits à Paunay.
Novem. 1761 : GUENIGAULT Jeanne 72 ans, veuve de François Charles de Préchapon.
4 - 1 - 1763 : MICHEAU Marie, 60 ans, veuve de Rateau Jacques, mère de François, de Marie Catherine, Marie Marguerite du Faubourg Chalon de Saivres.
7 - 2 - 1765 : MICHEAU Catherine, 61 ans, veuve Isaac Sarrault, sœur de Micheau Daniel bordier à Saivres.
8 - 6 - 1765 : CHARRON Jean, 58 ans, du Pairé, frère de Pierre.
5 - 10 -1765 : MERLEAU Pierre, 58 ans, cardeur à la Couture.
Sept - 1766 : CARRY Jean, 35 ans, époux Anne Daniau, de l'auberge de la Croix de Malte, faubourg Chalon de Saivres.
6 - 11 - 1769 : REDIEN Pierre, 87 ans, des Granges Besdin de Saivres père de Jeanne Redien épouse de Jacques Petrault tailleur d'habits.
6 - 11 - 1770 : FOISSEAU Charles, 35 ans, de la Chaillochère, cousin germain de Massé Samuel.
2 - 9 - 1771 : COUSSON Marie Catherine, 64 ans, du Faubourg Chalon de Saivres.
9 - 3 - 1773 : JOLLET Marie, 68 ans, du Grand Magnou, mère de Michel Delaumone.
2 - 12 - 1773 : DELAUMONE Michel, 60 ans, du Grand Magnou, oncle maternel de Louis Redien.
5 - 4 - 1774 : LAMBERT Pierre, 79 ans, la Coutancière, père de Pierre
Octob. 1774 : JOLLET François, 64 ans, charron du Faubourg chalon, père de Jollet Jean de Vinché.
Mai 1775 : CAILLEBAULT mari, 33 ans, épouse Texier Jacques bordier à Vix de Saivres
8 - 7 - 1775 : CHARRON Pierre, 65 ans, de Russay époux de Hercourt Madelaine
5 - 1 - 1778 : DESRE Jean, 70 ans de Verrières, oncle de Rouvreau François de Mons D'Azay le Brûlé
? - 6 - 1778 : CARRY Marie, 57 ans, sœur de Étienne Carry, maître de poste à chevaux et aubergiste de la Coupe d'Or Faubourg Chalon.
2 - 5 - 1779 : DUBOIS Angélique, 77 ans, veuve de Pierre Lambert de la Coutancière.
1 - 10 - 1779 : DESRE Jean, journalier à Verrière, 72 ans.
Septem.1780 : MICHEAU Suzanne, 75 ans, épouse Sapin Pierre, du Faubourg Chalon.
Juillet 1782 : DESRE François ,77 ans, journalier à Saivres.
3 - 8 - 1782 : ARCHAMBAULT Pierre, 68 ans, laboureur à Verrières
2 - 10-1782 : JOLLET Madeleine, 34 ans, épouse Dupuy François de Vinché
Septem.1783 : ALIX Madelaine, 26 ans et 9 mois, épouse de Louis Vandier de l'Herbaudière.
Août 1784 : Dame Renée BAUDIN, 71 ans, 4 mois, veuve de sieur Jacques Merigeot de Beauregard, marchand.
Novem. 1784 : Damoiselle Louise GUILLEMEAU, 72 ans, belle sœur de Alexis Aymon de la Renortière, capitaine d'invalide au Faubourg Chalon de Saivres
Mai 1785 : FAVRIOU Jacques, 75 ans, de Paunay, père de François domestique à l'Herbaudière.
Juin 1785 : GRÉGOIRE Jean, 34 ans, bordier au Bois de Saivres, beau frère de Jean Pied à cause de Louise Desré sa femme.
Juin 1785 : ROUVREAU Pierre, 48 ans, tailleur d'habits à Maunay, frère de Jacques, domestique.
10 - 6 - 1786 : CHARRON Françoise, 50 ans, du Pairé, sœur de Jean, laboureur au Pairé.
Ce n’est qu’au début du XIX° siècle, la Révolution ayant rétabli la liberté de culte, que l’on vit apparaître les tombeaux de pierres et les enclos avec la sobriété traditionnelle protestante
L’inhumation en cimetière de famille fut légalisée par un décret du 23 prairial de l’An XII et ouverte à tous les citoyens. Les protestants ayant leur cimetière particulier, continuèrent d’y enterrer leurs morts. De ce fait, des catholiques furent inhumés de la sorte en raison des mariages mixtes.
Après la Révolution, bien que devenus "biens communaux" ouverts à tous, les cimetières n’en furent pas moins divisés en deux parties avec quelquefois deux entrées (cas de Saivres), l’une étant réservée aux catholiques, l’autre aux protestants et autres proscrits de l’Église. A Saivres, le fond du cimetière, plus humide, était réservé aux protestants. Les deux parties du cimetière étaient séparées par un muret de pierres.
Le décret de l’An XII, à Saivres comme ailleurs, ne changea rien en matière de sépulture. Si cette pratique a tendance à disparaître, elle existe encore néanmoins dans les régions à forte implantation protestante.
Aujourd’hui, beaucoup de ces petits cimetières de familles n’existent plus ou sont complètement abandonnés aux ronces. Ceci est dû aux extinctions de familles, aux différentes cessions de terrains ou abandon volontaire du fait de l’ancienneté et de vétusté. Cependant il serait dommage de laisser disparaître ces témoins de notre histoire, qui est aussi l’histoire de gens simples qui ont tant souffert pour leur croyance.
Les inhumations, dans l’ancien cimetière communal, furent définitivement arrêtées en 1939.
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